lundi 25 juin 2007

Schizo-Père Darieux

Je m’apprêtais à ouvrir l’opercule d’une bouteille de jus d’orange lorsqu’à l’intérieur de moi quelqu’un a frappé. Ça a fait comme un grand courant d’air religieux quand j’ai entrebâillé ma tête, et laissé entrer… Père Darieux.

Je n’entrerai plus jamais dans un confessionnal.
Avant je savourais ces moments de vérité et d’humilité, le calme de l’isoloir se remplissant de murmures et de pardon. Je traquais avec émotion la différence entre les pas entrants, lourds, pressés, et les pas sortant, plus légers, plus dansants. Je m’amusais à entendre les petites faiblesses humaines, les colères non maîtrisées et leur sincère regret, les adultères coupables et contrits, les mensonges des uns, les cachotteries des autres, le regret de tous. J’offrais en souriant du temps d’écoute à cette vieille femme qui semblait s’inventer des petits péchés, oh, infimes, juste pour parler. J'entendais les fervents qui culpabilisaient à chaque petit pas dans l’ornière, ceux qui faisaient une grande embardée mais désiraient ardemment retrouver le sentier balisé du Bien. L’enfant qui venait juste dans l’isoloir pour pouffer, balbutier « Mon père, j’ai péché... une truite » avant d’exploser en fou rire et ressortait en courant et en criant à ses copains sur les marches : « Ouais, j’lai fait ! J’suis sûr que toi t’es pas cap’ ! Pas cap’, pas cap’ ! »
Je n’ai jamais aimé ceux qui se confessaient en essayant toujours de s’excuser. Tentant par tous les moyens de minimiser leur péché, lui recherchant des circonstances atténuantes afin de le rendre plus innocent. Mais Dieu pardonnait si le repentir était sincère.
Et dans l’infirmerie du Christ, par mon intermédiaire, tous les malades qui le voulaient vraiment guérissaient.

Je savourais tous ces instants, conscient de l’importance de la mission qui m’avait été confiée. Jusqu’au jour où est entré un autre genre de pénitent.
- Mon père, j’ai péché.
- Je vous écoute mon fils.
- J’ai trompé la confiance d’une femme. J’ai laissé mourir ses enfants. Un par un. Sans même lever le petit doigt.
Avant même que j’ai pu ouvrir la bouche, la personne s’était enfuie.

Le jour suivant alors que je touchais le chêne de l’isoloir, la même personne s’est assise derrière la grille. J’aurais reconnu sa voix entre mille.
- Mon père j’ai péché.
- Je vous écoute mon fils.
- Aujourd’hui j’ai tué plusieurs innocents.
Et le confessionnal s’est soudain vidé. Alors que ma main se crispait sur mon chapelet.
Jour après jour j’apprenais de nouveaux crimes, de nouveaux abus de confiance, de nouveaux « j’ai laissé faire », d’inlassables « J’ai tué des gens qui n’était pas de la même confession que moi », « je bannis l'homosexualité », « j'empêche et maltraite certaines femmes d'avorter », « j'en lapide d'autres pour n'importe quelle raison», une succession infinie des pires péchés qui soient. Juste une énumération.
Et toujours la personne fuyait.

Il n’y a jamais eu la moindre once de repentir. Et je n’ai jamais eu le temps, ni l’occasion, ni même la volonté je le crois bien, de lui accorder le sacrement de pénitence et de réconciliation. Cette personne se foutait bien d’être pardonnée. Se refusait à toute contrition. Voulait juste que je sache. Ce qui confine à la torture : je suis tenu au secret.
Dieu dans son immense miséricorde pardonne à tous ceux qui montrent un sincère regret. Mais il n’y a jamais eu de regrets énoncés, pas la moindre émotion dans la voix.

Hier je tremblais en rejoignant le confessionnal. La porte à peine refermée j’entendis :
- Mon père j’ai péché.
Ça n’a jamais été autre chose, jamais « Pardonnez-moi, mon Père, parce que j’ai péché ». Non. Jamais.
- J’ai puni plusieurs milliers de personnes en leur ôtant la vie.
Je l’ai arrêté net. C’est un fou. Un mégalomane en puissance. Et un piètre menteur, ce qui m’a rassuré.
- Qui croyez vous donc être, pour punir les gens ?, ai-je ironisé.
- Qui croient-ils que je suis, pour penser que j’en ai le pouvoir ? entendis-je en réponse.
Qui croient-ils donc que je suis pour m’ériger en excuse à la haine ? A qui pensent-ils s’en remettre lorsqu’ils massacrent ? Qui croient-ils honorer par les pires des actions ? Par qui croient-ils être guidés lorsqu'ils commettent l'impensable?
- Qui êtes-vous ? murmurai-je
- Je suis une des folies des hommes.
- ... Mais, ai-je chuchoté plein d’espoir, vous êtes aussi amour... ?
- Mais... l’amour, c’est juste l’amour non ?

Et puis plus rien. La voix s’est tue. Je n’ai pas entendu de pas quitter le confessionnal en martelant les dalles, je n’en ai jamais entendu y entrer.
J’ai quitté l’église.
Un enfant s’est élancé vers moi, et tout essoufflé m’a dit : « je suis celui qui est venu dans votre confessionnal la semaine dernière, et j’ai fait cette blague... vous savez, pêcher une truite... »

Je lui ai demandé négligemment tout en continuant à marcher : « Et tu veux te confesser ? »
« Non, je voulais juste m’excuser auprès de vous. »

Demain, ma lettre arrivera au diocèse : adressée à l’évêque, elle stipulera juste que dorénavant, je mettrai ma foi en l’homme.

22 commentaires:

CarrieB a dit…

Trsè joli texte encore, sujet bien délicat qui nous rappelle que les choses les plus belles de ce monde servent aussi de prétexte aux plus horribles.
Croire en l'homme, croire que nous sommes tous indubitablement liés les uns aux autres, c'est un mode de pensée qui me convient bien et permet de respecter mon prochain quelle que soit son origine ou sa croyance.

Anonyme a dit…

Un texte que j'aurais aimé écrire. La Religion (avec un grand "R") est la première cause de mortalité au monde dans l'histoire de l'humanité... et comme tu le dis si bien on n'a nul besoin de croire pour aimer.

Anonyme a dit…

Oi, achei teu blog pelo google tá bem interessante gostei desse post. Quando der dá uma passada pelo meu blog, é sobre camisetas personalizadas, mostra passo a passo como criar uma camiseta personalizada bem maneira. Até mais.

Madame Poppins a dit…

Je ne suis pas toujours certaine d'aimer mon prochain mais je suis certaine d'aimer ce texte !

Anonyme a dit…

Mais comment te viennent tes idées ? Ces descriptions... on y est, vraiment.
Tes textes me soufflent en tout cas...

(et tu peux même aller te faire des tee-shirt personnalisés avec tes textes dessus, selon Rodrigo !!!)

Madame Poppins a dit…

Méfie-toi, ma grande, le Rodrigo, il m'a fait la même proposition, y doit pas être "clean" à vouloir habiller ainsi toutes les femmes ! ;-)

Daniel Paillé a dit…

Une folie des hommes mais heureusement pas de tous...
Devant la misère, le néant la famine, la mort de ses proches, l'esclavage, les éléments furieux l'homme faible devient une cible parfaite pour ces folies. Une schizo sociale voir presque mondiale. Nous n'avons qu'a examiner quels sont les endroits ou cette folie s'accentue pour comprendre. Beau billet.
Bize

Daniel Paillé a dit…

P.S. j'ai du lire deux fois en passant, très bon billet.

Schizozote a dit…

Carrieb, oui, je crois que replacer les choses à l'échelle humaine justement ferait probablement du bien...

Stv, très juste, et après on nous met en garde contre les cigarettes !?! ;)

Madame Poppins 1, bah, aimer son prochain c'est pas toujours facile, ce qui compte c'est ne pas lui vouloir de mal non ? :)

Je rêve, comment les idées me viennent-elles ? c'est simple, voilà la recette : il suffit de s'ennuyer au boulot...(donc merci à mon employeur!) Heureusement que tu parles... espagnol? portugais ? euh, enfin merci pour le décryptage, ce qui me permets de répondre (en presque espagnol, tant pis) pour le fun à Rodrigo:

jamon y queso, cerveza, vamos a la buceo !

Madame Poppins 2, mouais, c'est rare ça, un type qui ne cherche pas à faire le contraire :)

Daniel Paillé, bien sûr, il y a toujours eu des hommes pour profiter des terrains fertiles et les religions, par l'interprétation que les jardiniers aiment à semer, sont un engrais rapide, et pas que pour les jolies fleurs...
merci de tes lectures :)

Anonyme a dit…

Toi t'es trop belle dedans, en vrai !
remarque dehors aussi ;-)

Anonyme a dit…

C'est du portugais, et comme j'ai suivi le lien pour voir de quoi il retournait, je peux te dire que tu t'es apparemment dégotée un petit brésilien ! (c'est le moment où jamais de planifier les vacances, non ???)

Anonyme a dit…

Buenos dias muchacha, puede venir en mi blog para enlevar tu camiseta, si quiere.
Stefano.

(Mon Dieu que mes restes d'espagnol sont loins ! C'est pour ça que je comprends pas le Portugais, sans doute...)

Anonyme a dit…

Hohé heu!!! L'aut' hé! C'est pas Ma faute d'abord, c'est vous qui z'êtes que des nazes! Si tu veux, Je l'reprends votre libre arbitre. Non mého. Tiens, pour ta peine, hop, miracle, tu vas avoir de tout petits seins: ZAP!!! Bien fait.

Cela dit, J'ai hâte que tu montes à Mes côtés. J'aurais bien besoin de quelqu'un au talent divin et à la plume d'ange pour m'aider à finir la nouvelle version de Mon Bouquin (un conseil, fais bien gaffe en traversant la rue...), parce ce que visiblement, ou Je me suis mal exprimé ou J'ai été mal traduit, mais J'ai Moi aussi la désagréable impression que le message s'est quelque peu perdu.

Daniel Paillé a dit…

STV, il te reste pas qu'un peu d'espagnol, il te reste une chemise aussi... à fleurs.
T'aurais jamais du passer cette vidéo, c'est l'image qui me vient en tête aussitôt que je vois les lettres STV.
Bize

Anonyme a dit…

Ouais mais si il veut, il peut imprimer ses initiales sur chaque fleurs de sa chemise, ya qu'à demander à Rodrigo ! (si vous voulez je traduis la demande, mes restes de portugais sont encore un peu valables.)

Schizozote a dit…

Féékabossée, ben t'as pas vu mon foie toi ! ;)

Je rêve, je me serais plutôt attendue à ce qu'un Brésilien fasse des impressions sur strings (ouh mais c'est une idée qu'elle est bonne ça. Mouais, faut aimer les miniatures, mais ça se tente. Qui n'en veut ??)

Stv/Stephano, c'est possible ça, sur ton blog ??

Dieu, merci de ton passage, je t'aiderai volontiers à écrire un autre bouquin à la condition qu'on rajoute un peu d'érotisme dans tout ça. Parce que sinon ça ne se vendra pas.
Et puis, j'ai pas de tout p'tits seins sacrebleu : j'ai des seins qui font mentir les hommes amoureux qui peuvent me murmurer "je les adore, ils sont exactement à la taille de ma main". (chaque sein dans une main, hein, me faites pas dire ce que j'n'ai pas écrit)

Daniel Paillé, ON PEUT LA REVOIR LA VIDÉO !!???? LA VIDÉO LA VIDÉO !!

Je rêve, ce serait la classe internationale ! Attends, Stv, il est cap' en plus !

Anonyme a dit…

moi je comprends rien à vos histoires de camisetas ...
enfin j'comprends pas le rapport avec le père Darieux ! tu crois qu'il personnaliserait sa soutane, avec un dessin de seins, ben tu dis qu'ils tiennent dans la main,alors pourquoi pas sur un dessin ?
pffff, ben voilà, je suis d'ja fatiguée de tout ce réflexage !et c'est que 7H30... allez bonne journée la Fée !

Anonyme a dit…

Daniel : tu n'as aucun goût en matière de chemise. C'est sûr qu'au Quebec, tu dois pas avoir beaucoup d'occasion de porter des vêtements pareils...

Mimi : je peux aussi me faire faire un tee-shirt jaune avec une petite vague noire, mais j'ai dis que j'alimentais plus "une porte vers ailleurs".

Schizozote : quoi, tu n'as jamais été sur mon autre blog ? Dis-moi pas qu'c'est pas vrai ?
Ceci étant dit, envois-moi une photo de toi sans chemise, tu verras si je la met pas sur mon blog...

Madame Poppins a dit…

Schizozote, une photo de toi sans chemise... je me demande si c'est pas une ruse, ça ;-))))) En tout cas, méfie-toi ;-))) Une fois de plus... ah, soupir, ces hommes !

Dis, Dieu, tu pourrais pas voir pour modifier un peu ton bouquin, genre la Vierge, c'est obligé qu'elle le reste ?

Schizozote a dit…

Féekabossée, les desseins des uns et des autres étant impénétrables (ou presque), j'y perds aussi mon latin!

Stv, ben tu penses bien que si, mais tu m'avais dit qu'il n'était plus alimenté alors j'ai joué la feignasse, bon ben j'y vais mais y'a intérêt à ce que la vidéo y soit... Sinon ? Ben sinon zut ;)

Madame Poppins, le monde est plein de polissons comme disait Brel !

Anonyme a dit…

Je ne l'alimente plus, mais je n'ai rien effacé : les vidéos du "Soleil à pas cher" y sont toujours (teaser + sessions 1, 2 et 3). C'était nul, mais je me suis bien marré (comme quoi !).

Schizozote a dit…

Stv, vu ! c'est vrai qu'elle tape la chemise !